Mme, MM. Ca y est. Vous êtes élu(e)…
Vous allez découvrir l’étendue des sujets qui touchent la gestion de la cité (assainissement, menu des écoles, ressources humaines, finances, etc…) avec des échelles de compétences qui s’entrecroisent (commune, EPCI, département, région, Etat).
Au milieu de tout cela, la question de l’habitat sera centrale pour répondre à l’ensemble des défis qui se poseront à vous.
Vous entendrez ainsi parler du Programme Local de l’Habitat (PLH), dispositif élaboré par l’intercommunalité qui vise à formaliser une politique qui facilite « l’itinéraire résidentiel ». C’est à dire de la naissance à la mort, comment chaque événement de la vie, heureux ou triste, a un impact sur le logement dans lequel vivre : quitter ses parents, étudier, premier emploi, mariage, enfants, divorce, départ des enfants, chômage, vieillissement et dépendance, …
Or, l’itinéraire résidentiel choisi devient un luxe. Il est de plus en plus subi, avec des effets sur l’ensemble de la vie des ménages : impossible de faire ses études dans telle ville à cause des prix, des temps de déplacement de plus en plus long pour aller travailler, un poids insupportable du logement dans le budget familial, des secteurs économiques qui ne peuvent plus recruter par manque de logements abordables, des ménages « à la rue » ou mal-logés, des marchands de sommeil qui font fortune, etc…
Le logement est au cœur de la crise sociale et sociétale que vit l’Europe. Au moment où je vous écris, la question du logement cristallise les débats des élections aux Pays Bas par exemple et favorise la montée des extrêmes.
Pour enfoncer le clou, le logement a un impact sur l’environnement : chauffages « carbonés », terres naturelles et agricoles artificialisées alors que le climat met chaque jour plus à l’épreuve nos manières de nous développer… et le logement construit il y a « 50 ans », à une autre époque, existe toujours dans un monde qui a changé…
Vous l’aurez compris, la politique du logement est centrale au quotidien, à courts, moyens et longs termes. Et nous devons sans cesse corriger les erreurs du passé, faites sans savoir qu’elles allaient allait peser si fortement sur nos enfants. La responsabilité est forte.
Le PLH, parmi d’autres dispositifs en lien avec l’aménagement du territoire, se distingue par un aspect très opérationnel et de libertés. Il est moins contraint que d’autres dispositifs par des histoires de planification réglementaire d’urbanisme. Et le PLH parvient même parfois à s’affranchir de cadres de programmation technique et comminatoire de logements.
Les logiciels « planification et programmation » dirigent d’ailleurs la réflexion des politiques d’aménagement du territoire et de l’habitat depuis des décennies. Bon… si on se réfère aux paragraphes précédents le résultat n’est pas fameux… d’ailleurs, cela fait 30 ans que j’écris des PLH en débutant par diagnostiquer le territoire… et à chaque fois on montre que la situation a empiré… pourtant on a fait plein de choses, on a planifié, programmé, aidé…
Il faut donc changer de « logiciels », sans non plus jeter le bébé avec l’eau du bain !
Votre rôle est clef. Le microcosme de l’habitat, comme dans d’autres domaines, est très technique et se complait dans les acronymes divers et variés. Pour autant, « habiter » est un sujet vital et naturel pour tout un chacun.
Ne soyez surtout pas « élu- technicien » mais portez les défis auprès de l’Etat, des bailleurs sociaux, des promoteurs, des aménageurs, etc… Interrogez les « sachants » en vous basant sur la réalité que vous allez connaitre : les situations des ménages au quotidien. Parlez des gens et des besoins. C’est votre légitimité.
Mais ne cédons pas non plus au populisme facile. Certes tout ne fonctionne pas bien, mais soyez fiers quand vous contribuez à loger un jeune ménage sur votre territoire, quand vous participez à héberger une famille en rupture de logement, quand vous aidez un couple de seniors précaires à adapter son logement à ses besoins, quand une entreprise peut se développer grâce au logement d’actifs, quand une femme victime de violences conjugales est protégée dans un logement sûr, etc…
Trop facilement les débats tournent à la critique et à la protection de sa sphère de confort… Certains acteurs ne connaissent objectivement pas la crise immobilière…. Et d’autres, au premier rang desquels les services de l’Etat local sont très exposés et démunis face aux remarques sur leurs défaillances… qu’ils subissent aussi…
Le nouveau modèle passe par plus d’exigences, d’écoutes et de compréhension, d’acceptation du doute…
Le doute… C’est étonnamment ce qui manque le plus pour avancer concrètement sur des PLH efficaces.
Cela fait plus de 30 ans que j’entends des certitudes contradictoires sur ce qu’il faut faire. Mais ce qui est sûr, c’est que quand le logement est malade l’ensemble de la société souffre et que nos réponses sont sous-dimensionnées.
Alors on s’y met ? Autrement ? On se lance dans des mandats locaux qui prennent à bras le corps la question du logement ?
Et en plus, c’est une politique publique locale où chaque € investi a potentiellement une retombée économique multiplicatrice sur le territoire.
Donc, mis à part que c’est une thématique exigeante mais passionnante, rien ne vous empêche de construire un nouveau mandat avec la politique du logement au cœur de la politique locale.
Prêt à se lancer ?
Bien cordialement, et tous mes vœux de réussite pour ce nouveau mandat !